L’une de mes histoires de Noël préférée vient de Provence, dans le sud de la France. Il y a deux cents ans, pendant la Révolution française, le nouveau gouvernement empêchait les églises d’exposer leurs crèches traditionnelles à tailles réelles, et ce dans chaque village provençal comme ailleurs en France.

Par conséquent, beaucoup de gens ont commencé à installer de petites crèches chez eux. En plus des traditionnels bergers et roi mages, les personnages de la crèche incluaient tous les villageois de Bethléem, vêtus non pas de robes des temps bibliques, mais plutôt des vêtements traditionnels des métiers de la campagne française : le musicien, le meunier, le pêcheur, l’affûteur de lames, et le riche fermier. Chacun était représenté en train de se rendre à l’étable, apportant son présent spécial à l’enfant Christ. Ce cortège nocturne des habitants d’un village provençal allant voir la famille sainte est la scène décrite dans le cantique de Noël français « Un flambeau, Jeannette, Isabelle ! »

L’histoire du village provençal qui visite Jésus après sa naissance

Ma version préférée de l’histoire est racontée par un ange nommé Boufaréo, qui parle avec un accent caractéristique du sud de la France, où ils prononcent les mots d’une manière musicale, souvent avec un son nasal à la fin. Je ne tenterai pas d’imiter l’accent, mais voici ce que l’ange Boufaréo a raconté de cette nuit-là :

Je vais vous dire comment tout s’est passé, parce que, après tout, de là où j’étais, j’étais celui qui avait la meilleure vue. C’était la nuit du 24 décembre, et le vent violent de l’ouest soufflait et tous les gens de Bethléem allèrent au lit de bonne heure. Et ils tirèrent les couvertures au-dessus de leurs têtes pour ne pas entendre les sifflements du vent. Le vent de l’ouest, qui était un ami du bon Seigneur, avait chassé les nuages sur des milliers de kilomètres, pour que le ciel soit tout propre et brillant d’étoiles pour la naissance du petit. Ce n’était pas une mauvaise intention, mais cela a beaucoup fait baisser la température. Je n’avais que mes ailes pour me couvrir, et je croyais que j’allais mourir de froid. Je me suis recroquevillé du mieux que j’ai pu.

Enfin, je les ai vu, ces malheureux. Ça faisait peine à voir. Saint Joseph marchait devant, sa barbe agitée par le vent comme un serpentin. Il essayait de faire bouclier pour la sainte Mère avec ses larges épaules. De temps en temps, il se retournait et disait :

“Comment vas-tu ma belle ?”

Je ne peux pas continuer” Répondait Marie.

Continue encore un peu plus. Regarde, je vois une cabane là-bas, tout près.”

Personne ne veut de nous,” dit Marie désespérée.

“Et bien, peut-être pas les gens riches, mais ici, ce sont les pauvres. Ils nous feront certainement une petite place.”

Marie trébucha et tendit la main vers Joseph, “Donne-moi ton bras.”

Voilà, tiens-toi bien…” dit-il.

“Oh, que ça fait mal ! Aïe !” Criais Marie.

“ Oh, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe,” dit Joseph, “quelle misère, oh, nous sommes vraiment dans une mauvaise situation. Pas d’argent, pas de maison, et une femme qui va accoucher au milieu de la nuit ! Et par un temps horrible ! N’aie pas peur… Attend, je vais te porter.”

Pardonne-moi d’être un tel fardeau, Joseph,” dit Marie.

Je suis sûr qu’on s’en sortira, répondit-il. “Mais quand même, le bon Seigneur nous en demande trop. Quand j’ai accepté de t’épouser, j’aurais dû lui donner mes conditions.”

Le regrettes-tu ?” Demanda Marie gentiment.

“Non, mais écoute bien ma beauté », dit Joseph. « Qui suis-je? Moi, je ne suis personne. Et le bon Seigneur m’a donné le droit de te tenir la main, de te porter dans mes bras, toi, la mère de Son Petit. Et tu crois que je pourrais le regretter?

Oh, mais tant de bonheur, c’est quelque chose que je ne mérite pas. Si seulement le bon Seigneur nous aidait juste un peu. Sinon, nous courrons au désastre ! Et les gens diront que c’était de ma faute. Attend ici, ne bouge pas, nous y sommes. Toc, toc, toc. Il y a quelqu’un ? Oh, les pauvres gens dorment. Je ne veux pas les réveiller, mais je n’ai pas le choix. Toc, toc, toc.”

Comme nous le savons tous, la recherche de Joseph et Marie d’un abri s’est terminée dans une étable pleine de paille ou le bébé était couché dans une mangeoire. Finalement, tous les villageois dans l’histoire ont été guidés vers l’endroit où Jésus était allongé. Et en chemin, tous les villageois furent touchés par leurs propres miracles en cette première nuit de Noël. Le meunier fainéant, qui soulageait sa grande tristesse en dormant tout le temps, se réveille soudainement avec l’envie de moudre du blé. Comme pour répondre à un souhait non évoqué, les ailes de son moulin se mettent à tourner bien qu’il n’y ait pas la moindre brize pour les faire bouger. Le voleur vole un dindon et est étonnamment pris de remords. Le gendarme qui avait essayer d’attraper le voleur pendant des années, perd de façon aussi étonnante l’envie de l’arrêter. La poissonnière vois son poisson pourri devenir si frais qu’il paraît presque vivant ; et son mari Pistachié, un chasseur malchanceux, réussi à tirer un lapin pour la première fois, et l’apporte en cadeau au nouveau-né.

Pour finir, le vieux berger, dont le seul compagnon, un chien de berger, est mort pendant la nuit, crie de joie quand son ami adoré gémi soudainement et revient à la vie. Pensant que le chien pourrait être utile pour garder l’étable, il le présente à la sainte mère. Refusant son cadeau, Marie dit : « Berger, mon fils sera un jour un berger comme toi. Il sera un berger pour les hommes, et les hommes n’ont pas besoin d’un chien pour les garder. Ils ont besoin d’amour.” Les paroles de Marie pénètrent le cœur du berger et, selon l’histoire, il devint plus tard l’un des apôtres du Seigneur.

En arrivant à l’étable, l’aveugle tombe à genoux et loue le Seigneur. Surprise, Marie s’écrie : “Tu remercies Dieu, toi qui n’a jamais vu les cieux ou les étoiles ? Toi qui es enfermé dans la plus sombre des prisons ? » Marie commence une prière pour guérir sa vue, mais l’aveugle l’interrompt : Oh, non, non, bonne mère, non, ce n’est pas la peine. Ne Le dérange pas. Je sais que le monde est beau, parce que c’est Lui qui l’a fait, et je suis certain que les cieux sont encore plus beaux parce que c’est là qu’il vit. Non, demande-Lui seulement qu’il ne me fasse pas attendre longtemps ; que j’ouvrirai les yeux le jour de ma mort ; que je verrai quand cela vaudra vraiment la peine de voir. »

Puis le groupe de villageois se met à chanter.

Alors que tout le monde chante, une autre personne entre dans l’étable. C’est l’avare sans cœur Roustido. Il était le seul homme riche de Bethléem, et plus il avait d’argent, plus son cœur s’endurcissait. C’était lui qui avait claqué la porte de l’auberge au nez de Joseph et Marie, les appelant des mendiants et des bons à rien. L’ange explique que le nom de Roustido a été laissé hors des Évangiles parce que les disciples de Jésus ne voulaient pas qu’il se sente mal à l’aise.

Roustido reste silencieux dans son coin et, petit à petit, un sentiment de gentillesse, de bonté l’envahie. Il combat ce sentiment merveilleux, se répétant encore et encore : « Qu’est-ce qui t’arrive, Roustido ? Pourquoi n’es-tu pas en colère ? Tu es complètement fou ! Aller, met-toi en colère ! » Mais au lieu de se lever pour crier sur les villageois, il continue à ne pas bouger, et il se sent de mieux en mieux à chaque moment qui passe.

Puis, enfin, Roustido se lève. Il s’agenouille devant la famille sainte et, se frappant la poitrine avec force, s’écrie : « bébé Jésus, je suis un homme méchant. Quand ton père et ta mère ont frappé à ma porte, je les ai laissés dans la rue. Je ne pourrai jamais me pardonner. Je suis un criminel. Je vais préparer un joli chariot couvert pour vous, avec un gentil cheval. Et je vais vous conduire à ma maison et vous mettre dans la chambre la plus belle et la mieux chauffée. Je veux parler de ma chambre. Et vous y resterez tant que vous le voudrez, jusqu’à la fin de vos jours si vous le voulez. Et vos soucis seront terminés. 

Joseph, intéressé par l’offre, répond : « Ah, tu es très gentil. Qu’est-ce que tu en pense Marie ? » Mais Marie dit : « Mon Fils et moi te remercions, mais nous ne pouvons pas accepter ton offre. Nous devons rester ici dans l’étable pour accomplir la volonté de Dieu. »

Et, à ce moment, chaque villageois s’immobilise comme pour se faire prendre en photo, mais il ne s’agit pas d’une photo. Chaque figurine d’argile de la crèche prend position, et ne bouge plus. Ils resteront parfaitement immobiles jusqu’à la fin du monde : Marie et Joseph regardant le bébé Jésus endormi avec leurs têtes penchées sur leurs épaules et leurs mains jointes ; le rêveur, les mains en l’air ; l’aveugle penché sur sa canne ; le chasseur Pistachié penché sur sa carabine ; la poissonnière, un panier de poissons sur chaque côté de ses larges hanches ; le berger avec un agneau immobile atour du cou et son chien endormi entre ses jambes ; le voleur, avec les mains posées amicalement sur l’épaule du Gendarme ; l’avare Roustido, avec un sourire sur le visage pour la première fois de sa vie ; et le bœuf et l’âne qui se sont endormis, envahis par le bonheur.

paysage de Provence

La belle morale de cette histoire

Pourquoi est-ce que j’aime cette histoire simple ? Parce qu’elle transmet le message le plus vital que chacun de nous puissions partager avec nos êtres chers pendant la période de Noël :

  • Que le Christ est venu pour changer le cœur des hommes ;
  • Qu’un changement de cœur signifie une vie remplie de joie ici et dans l’au-delà ; et
  • Que les vies remplies de joie des chrétiens fidèles sont autant de millions de bougies scintillantes qui peuvent éclairer et apporter de l’espoir à tous ceux qui sont maintenant dans l’obscurité.

S’il y a de l’espoir pour Roustido, l’homme sans cœur, il y a de l’espoir pour vous et moi. L’espoir né de changements profonds et permanents ne vient pas d’une simple auto discipline ou de la détermination, but de la foi et de la repentance envers le Seul pouvant remodeler complètement la nature humaine à Son image. Bien que nous puissions penser qu’il soit impossible que des années d’accumulation de rancœurs puissent tout à coup guérir par le baume de l’amour du Christ, bien que nous puissions autrement désespérer devant les échecs répétés pour surmonter les faiblesses et les addictions, bien que nous puissions faire face à des montagnes d’ennuis de toutes sortes et de toutes parts, je rends témoignage du grand espoir que nous avons en notre Sauveur, et dans le pouvoir de Son Expiation.

J’aime les paroles de Moroni :

Et si les hommes viennent à moi
Je leur montrerai leur faiblesse
Je donne aux hommes de la faiblesse
afin qu’ils soient humbles
et ma grâce suffit à tous ls hommes
qui s’humilient
devant moi ;
car s’ils s’humilient
devant moi,
et ont foi
en moi,
alors je rendrai fortes pour eux
les choses qui sont faibles.

Quel cadeau offrirons-nous à l’enfant Christ en cette période ? Selon le président Eyring: 

Il nous a dit ce que nous pourrions Lui donner pour lui procurer de la joie. Tout d’abord, nous pouvons, par foi en Lui, donner un cœur brisé et un esprit contrit. Nous pouvons nous repentir et contracter des alliances sacrées avec Lui. Il y a ceux qui entendent ma voix et qui ont ressenti Son invitation à la paix que son évangile apporte, mais qui ne l’on pas encore accepté. Vous Lui donneriez de la joie si vous agissiez maintenant et veniez à Lui tant que vous le pouvez.

Ensuite, vous pouvez Lui offrir le cadeau de faire pour les autres ce qu’Il ferait pour eux. Beaucoup d’entre vous l’ont déjà fait et ont ressenti Son appréciation. Cela a pu être le fait de visiter une veuve seule. Cela a pu être le fait de vous joindre à d’autres pour un projet d’aide à ceux qui sont dans le besoin….

Beaucoup d’entre vous trouverons en cette période de Noël des occasions de donner de la nourriture à des gens qui ont faim. En le faisant, vous donnez de la joie au Seigneur. Pourtant, Il nous a enseigné qu’il y a une façon de donner un cadeau encore plus précieux et durable. Il a dit : « Je suis le pain de vie : celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; et celui qui croit en moi n’aura jamais soif. » De toutes les gentillesses que nous Lui donnons, la plus grande que nous puissions lui offrir est de diriger ceux que nous aimons et servons vers Lui, la seule source de vie éternelle.

Puissions-nous, comme le président Monson nous l’a rappelé, faire de Noël « un moment de paix parce que nous avons trouvé la paix dans les enseignements du Christ » Ceci est ma prière.

 


CLIQUEZ ICI pour une version vidéo de « La pastorale des santons de Provence » accompagné du texte en français d’Yvan Audouard, et incluant les images des « santons » évoqués dans cet article.

 

References

Audouard, Yvan. La Pastorale des santons de Provence. Paris, France : Le pré aux clers, 1986.

Barker, Margaret. Christmas: The Original Story. London, England: Society for Promoting Christian Knowledge, 2008.

———. “The Infancy Gospel of James and translation of the text.” In Christmas: The Original Story, edited by Margaret Barker, 128-61. London, England: Society for Promoting Christian Knowledge, 2008.

A Catalan Christmas Carol. In Catholic Inspiration: A Pilgrim’s Collection of Spiritual Mattershttp://www.acatholicinspiration.com/2012/01/03/a-catalan-christmas-carol/. (consulté le 22 novembre 2014)

El Noi de la Mare (L’Enfant de la mère) Dans Wikipediahttp://en.wikipedia.org/wiki/El_Noi_de_la_Mare. (consulté le 22 novembre 2014)

Eyring, Henry B. 2010. The gift of a Savior. In 2010 First Presidency Christmas Devotional, 5 December 2010. https://http://www.lds.org/broadcasts/article/christmas-devotional/2010/12/the-gift-of-a-savior?lang=eng. (consulté le 21 novembre 2014)

Keyte, Hugh, and Andrew Parrott. The New Oxford Book of Carols. Oxford, England: Oxford University Press, 1994.

Le jongleur de Notre Dame. In Wikipediahttp://en.wikipedia.org/wiki/Le_Jongleur_de_Notre_Dame. (consulté le 21 novembre 2014).

The Little Drummer Boy. Dans Wikipediahttp://en.wikipedia.org/wiki/The_Little_Drummer_Boy. (consulté le 21 novembre 2014)

Monson, Thomas S. 2010. A bright shining star. In 2010 First Presidency Christmas Devotional, 5 December 2010http://lds.org/broadcasts/article/christmas-devotional/2010/12/a-bright-shining-star?lang=eng – 1. (consulté le 16 décembre 2010)

The Son of Mary (El Noi de la Mare). In ChoralWikihttp://www2.cpdl.org/wiki/index.php/The_Son_of_Mary_(El_Noi_de_la_Mare)_(Traditional). (consulté le 22 novembre 2014)

What Shall We Give? Mormon Tabernacle Choir and Orchestra at Temple Square. In MusixMatch. https://http://www.musixmatch.com/lyrics/Mormon-Tabernacle-Choir-Orchestra-at-Temple-Square-2/What-Shall-We-Give. (consulté le 22 novembre 2014).

 


Article adapté d’un discours de Jeffrey M. Bradshaw, donné dans la branche d’Atmore, Pieu de Mobile Alabama, le 14 décembre 2014. Publié sur Meridian Magazine sous le titre The Marvelous Story of the French Villagers Who Witnessed Christ’s Birth in Bethlehem. Traduction par Samuel Babin.