J’ai été mariée plus de trente ans avant que mon mari ne dévoile son addiction au sexe.
Il y avait des signaux d’addiction partout autour de moi qui auraient dû me prévenir mais je ne savais pas ce que je devais rechercher. Je n’aurais jamais suspecté que mon mari bien aimé, père et dirigeant de l’Eglise puisse lutter contre une telle affliction. Il ne correspondait pas à l’image que je me faisais d’un accro au sexe :
un gars au teint blafard constamment sur son ordinateur dans une chambre sombre en train de regarder des images malsaines.
Comme beaucoup d’autres, j’ai commis l’erreur de penser que l’addiction au sexe n’est que le fait de regarder de la pornographie et rien de plus. J’avais tort à tellement de niveaux.
LES FEMMES SONT AUSSI CONCERNÉES
Tout d’abord, les hommes ne sont pas les seuls à avoir cette addiction. De plus en plus de femmes se font piéger par ce fléau. En fait, une personne sur trois regardant de la pornographie est une femme. La lecture de littérature érotique, une autre forme de pornographie, est plus répandue chez les femmes que chez les hommes.
Donc avant de se plaindre des hommes, les femmes feraient bien de réfléchir à deux fois avant de lire des romans obscènes !
Lorsque l’on parle d’addiction à la « pornographie », en plus de lire de la littérature érotique, nous devrions ajouter d’autres comportements sexuels compulsifs tels que :
le voyeurisme,
l’exhibitionnisme,
la masturbation,
les fantasmes sexuels,
échanger des sms sexuels,
vouloir constamment attirer l’attention des membres du sexe opposé,
ou toutes autres poursuites et/ou pensées sexuelles.
Comme toutes les autres addictions, le comportement peut évoluer en commençant par regarder des images pornographiques jusqu’à rechercher des relations illicites avec des prostitués ou des affaires extra conjugales. Certaines attitudes peuvent comporter des risques pour la santé, tels que les MST, et peuvent porter préjudice aux relations et aux carrières. Ceux qui affirment qu’il n’y a rien de mal dans la pornographie adhèrent au mensonge colporté par une industrie de plusieurs milliards de dollars.
DIFFICILE À DÉTECTER
A l’inverse d’autres addictions, il n’existe pas de symptômes physiques pour détecter un problème, ce qui rend l’addiction au sexe facile à dissimuler. Personne n’aime parler ouvertement de sexe. Par conséquent les addictions qui y sont associées restent secrètes et cachées par honte. J’ai pensé que j’étais une parfaite idiote pour ne pas avoir remarqué les problèmes de mon mari pendant tant d’années, mais mon histoire n’est pas exceptionnelle. Après des années passées à se cacher, mon mari, comme beaucoup d’accros au sexe, est devenu un expert pour cacher la vérité et pour camoufler certains comportements. Il est important de savoir que la souffrance réelle de cette addiction pour les partenaires vient du sentiment de se sentir trompé. C’est pourquoi beaucoup de partenaires d’accros au sexe souffrent d’un traumatisme de trahison. Ils se sentent trahis et trompés. C’est horrible car cela vient de la personne en qui vous pensiez avoir le plus confiance.
SOBRE NE VEUT PAS DIRE GUÉRI
Lorsque les personnes accros commencent à montrer une attitude révélant clairement leur addiction, cela s’appelle « une mauvaise conduite ». Certains croient à tort que lorsque ces mauvaises conduites cessent, l’addiction est partie. Quand les accros arrêtent ce genre de comportement lié à leur addiction, ou lorsqu’ils sont dans une période d’abstinence, on dit qu’ils sont « sobres ». Etre sobre n’est pas la même chose que d’être en guérison. Le thérapeute Forest Benedict, décrit la guérison comme
« … Un changement de mode de vie qui nous fait passer d’un comportement de négligence de soi et d’auto destruction à un mode de vie ou l’on prend soin de soi-même. »
UN CHANGEMENT DE VIE DURE…TOUTE LA VIE !
Beaucoup de jeunes gens mettent leur vie en ordre et stoppent leur mauvaise conduite avant de partir en mission. Ils sont sobres pendant deux ans, mais les causes à la base de leur comportement liées à l’addiction ne sont pas traitées. Ils sont sobres, mais pas en guérison. C’est pourquoi un grand nombre de missionnaires rentrent chez eux et retournent à leurs mauvaises habitudes. Ils n’ont pas reçu les outils nécessaires pour une guérison définitive. Certains conjoints se trompent en pensant que leur partenaire est en guérison parce qu’il ou elle n’a plus de mauvais comportement pendant une longue période. Les accros peuvent apprendre à « s’accrocher » à leur abstinence. Ils s’accrochent de toute leur force pour rester sobres et réussissent pendant quelques temps grâce à leur volonté jusqu’à ce qu’ils replongent dans leurs émotions malsaines et recommencent à avoir un mauvais comportement. Ce cycle répétitif de comportement s’appelle le cycle d’addiction. Etre sobre est l’étape initiale pour guérir, mais il reste bien plus à faire avant que de réels changements puissent se faire et conduire à la guérison.
LES SIGNES D’ALERTE
Si j’avais eu toutes ces informations dès le début, j’aurais pu remarquer certains signes qui m’auraient alerté à propos de mon mari. Après avoir travaillé diligemment pendant presque deux ans pour sa guérison, je peux maintenant voir des signes réels qu’il est en train de changer.
Et quels sont les autres signes indiquant une addiction à part le mauvais comportement ? Je vais vous donner des exemples « d’avant guérison » et de « pendant la guérison » d’après mes propres expériences basées sur les signes les plus subtiles d’une addiction au sexe en contraste avec le comportement associé à une guérison réelle. Chacun a sa propre méthode pour la guérison, donc gardez à l’esprit qu’il s’agit de MES expériences et observations concernant le parcours de mon mari. Chaque personne accro doit choisir son propre chemin et aucun de ces chemins ne va ressembler aux autres. J’ajouterai également la réflexion et les sentiments de mon mari tel qu’il les a partagés avec moi.
LA ROUTINE QUOTIDIENNE
Avant la guérison : Mon mari et moi avons prié ensemble et lu les écritures la plupart du temps. Nous étions très occupés chaque jour avec nos carrières, nos appels dans l’Eglise et la famille. Trop occupés, en fait ! Nous travaillions tous les deux beaucoup et nous avions des appels dans l’Eglise qui demandaient beaucoup de temps également. Nous nous voyions la plupart du temps en coup de vent. Nous avons essayé de nous rattraper en planifiant des sorties ensemble toutes les semaines, mais cela ne se passait pas toujours comme prévu. Notre vie de tous les jours nous filait entre les doigts.
Pendant la guérison : Selon le docteur Adam Moore, « Votre mari (conjoint) peut être sobre, mais cela ne veut pas dire que sa guérison est permanente. Il recommande fortement qu’il (elle) créée une série de routines visibles et mesurables que vous puissiez vérifier. » Nos journées commencent vers 5 :15 du matin lorsque mon mari allume la version audio du Livre de Mormon. Il l’écoute pendant 30 minutes puis pense à ce qu’il a entendu tout au long de la journée. Il dit que cette méditation sur le Livre de Mormon l’aide à garder ses pensées pures et positives. Mon mari prépare ensuite le petit déjeuner pour la famille en écoutant et chantant ses chansons inspirantes préférées. Ces chansons repassent dans sa tête souvent et l’aident aussi à contrôler ses pensées. Avant le petit déjeuner, nous faisons ce que nous appelons « le câlin miraculeux de deux minutes ». Nous le faisons souvent pendant notre prière du matin également. Avant de partir, mon mari et moi nous embrassons longuement et tendrement ! Mon mari a réduit ses heures de travail. Nous sommes ensemble à la maison la plupart des soirées. Avant d’aller au lit, nous procédons à une vérification (nous utilisons un procédé appelé FANOS) durant laquelle nous partageons nos sentiments et exprimons notre gratitude l’un pour l’autre. Mon mari profite de ce moment pour évaluer sa progression dans la guérison et me préviens s’il éprouve des difficultés avec des émotions qui déclenchent son addiction. Nous appelons ces routines nos « quotidiennes » et mon mari en a une douzaine par jour. La vie ne passe plus comme un coup de vent. Nous pratiquons la pleine conscience et l’autonomie. Nous sommes davantage conscients de nos besoins et de ceux des autres. Lorsque je vois mon mari faire des choix délibérés chaque jour pour changer des choses dans sa vie, la confiance que j’ai dans sa guérison grandit.
LES ÉMOTIONS
Avant la guérison : Quand je demandais à mon mari « Comment s’est passé ta journée ? » J’avais toujours la même réponse : « Très bien ! » J’ai fini par lui dire que personne ne pouvait avoir de « très bonne » journée chaque jour de sa vie. Après cela, sa réponse était un résumé de ce qu’il avait fait, mais il ne partageait jamais ses sentiments. Je ne le savais pas à l’époque, mais il était incapable d’identifier ses émotions. Je suis une personne anxieuse possédant toute une palette d’émotions et j’ai épousé un homme qui, de par sa propre description se sentait « bien » ou « mal ». Les accros utilisent une drogue, une substance ou une attitude pour s’insensibiliser ou se déconnecter émotionnellement des sentiments ou émotions négatives. Malheureusement, vous ne pouvez pas vous désensibiliser des sentiments négatifs sans le faire également pour les sentiments positifs. Sans compréhension des émotions, un accro a tendance à manquer d’empathie et rejettera souvent la faute sur les autres au lieu d’assumer la responsabilité de son comportement malsain. Je pensais que mon mari était empathique car il m’écoutait toujours avec attention. Je pouvais partager tout et n’importe quoi avec lui : mes espoirs, mes rêves, mes frustrations, mes déceptions, tout ! Mais il ne faisait pas la même chose avec moi, même quand je le suppliais.
Pendant la guérison : Pour atteindre la vraie guérison, et pas juste pour traverser une autre longue période d’abstinence, mon mari avait besoin d’apprendre au sujet des émotions. Avez-vous déjà vu l’un de ces diagrammes des sentiments avec tous les visages différents qui représentent des émotions ? Oui, mon mari a dû étudier ce diagramme pendant quelques minutes chaque soir avant de me faire part de ses émotions durant nos vérifications. Cette pratique quotidienne a porté ses fruits et maintenant mon mari affirme que son monde est « inondé par un arc en ciel d’émotions ». C’est une preuve réelle de guérison ! Mon mari qui avait beaucoup de mal à identifier ses émotions parle maintenant d’un arc en ciel d’émotions !
LA THÉRAPIE
Avant la guérison : Rien ne se passait. Il croyait que le fait d’aller à l’église, de prier et de lire les écritures pouvait guérir n’importe quoi ! Notre thérapeute nous taquine aujourd’hui en rappelant notre première visite. Mon mari avait les bras croisés sur sa poitrine avec un regard qui disait : « Je vous met au défi ne serait-ce que d’essayer de fendre mon armure ! »
Pendant la guérison : Mon mari consulte un thérapeute deux fois par mois pour discuter de traumatismes pendant son enfance et d’autres problèmes qui ont alimenté son addiction. Nous voyons ensemble un conseiller matrimonial une fois par mois pour nous aider à naviguer à travers les tempêtes de son addiction. Mon mari participe également à un groupe de soutien chaque semaine. Il est maintenant capable de reconnaitre ces émotions à l’aide d’outils et de stratégies qu’il a reçu au sein de ce groupe. Son groupe le tient également pour responsable de son comportement pendant la semaine. Mon mari apprend par la même occasion comment interagir avec les autres en créant des liens avec les membres du groupe. Un groupe de soutien est comme avoir une équipe de gens à vos côtés alors que vous traversez de nouveaux territoires pendant votre guérison.
CONNEXIONS
Avant la guérison : Mon mari a appris très jeune à gérer les traumatismes d’enfance en enterrant ses émotions négatives. Ses émotions désensibilisées et enterrées limitaient sa capacité à établir des connexions émotionnelles avec les autres. Bien que mon mari essayait d’être gentil avec moi et de bien me traiter, il était incapable de ressentir un quelconque lien émotionnel profond avec moi ou avec quelqu’un d’autre. Il savait comment doit se comporter un bon mari et père et réussissait très bien à incorporer ces comportements dans sa vie. Mais je ressentais parfois qu’il s’agissait plus d’un comportement de façade que quelque chose de réel. Je ne parvenais pas à ressentir la profondeur de son amour parce que cela nécessitait un lien émotionnel et intime que nous n’avions pas. C’est probablement la plus grande tragédie que certains couples traversent lorsqu’il y a une addiction.
Pendant la guérison : On m’a dit que les couples qui travaillent dur pour surmonter une trahison peuvent forger une relation plus solide. Bien que cela puisse sembler impossible, mon mari et moi commençons à créer des liens affectifs et intimes merveilleux. Mon mari apprend à partager ses sentiments les plus profonds avec moi, ce qui m’aide à me sentir valorisée en tant que partenaire. Nous nous entrainons à utiliser des moyens pour être honnêtes, transparents et emphatiques lorsque nous communiquons. Apprendre à se comprendre émotionnellement et intimement est une nouvelle source de joie pour moi. Selon une revue de Psychologie,
« les couples qui s’efforcent d’avoir un tel niveau de connexion bénéficient d’un sentiment de paix avec eux-mêmes et l’un avec l’autre. Ils sont disposés à partager leur pires échecs et erreurs, leurs expériences les plus embarrassantes, leurs sentiments de ne pas être à la hauteur, leurs côtés les plus sombres de même que leurs rêves, visions et espoirs les plus grands. Ils sont aussi davantage disposés à exprimer leur gratitude et leur appréciation mutuelle plus librement. Tout cela mène à une formule pour améliorer le bien-être émotionnel ainsi que la santé physique. Guérir d’une addiction nécessite de travailler dur, mais faire l’expérience de l’intimité émotionnelle et se sentir connecté en vaut largement la peine.
L’EXPIATION
Avant la guérison : Mon mari et moi avons toujours cru en Christ. Mon mari priait sans cesse pour être plus fort que son addiction. Il avait de longs moments d’abstinence et pensait qu’il avait résolu son problème avant de replonger un peu plus tard. Il priait pour avoir plus de force, mais chutait à nouveau.
Pendant la guérison : Au lieu de prier pour recevoir de la force, mon mari prie maintenant pour recevoir de l’humilité pour permettre au Sauveur de l’aider dans sa vie. Mon mari dit :
« Je fais ce que je dois faire pour guérir, mais le Christ est le finisseur. Utiliser le pouvoir de l’Expiation pour ma guérison n’est pas une chose à ne faire qu’une seule fois. Je dois le faire tous les jours. »
Nous sommes tous les deux devenus plus dépendants du Christ. Tout comme mon mari a dû remettre son addiction au Sauveur, j’ai dû lui remettre ma douleur causée par mon sentiment de trahison, et ouvrir mon cœur de manière à pardonner et à comprendre. Nous avons tous les deux désespérément besoin de l’Expiation dans nos vies. C’est une partie intégrante de qui nous sommes et de qui nous voulons devenir. Elder Richard G. Scott a enseigné :
« Peu importe la source de difficulté et peu importe la manière avec laquelle vous êtes aidés, que ce soit avec un thérapeute qualifié, un docteur, un dirigeant de prêtrise, un ami, un parent soucieux, ou un être aimé, peu importe ce que vous faites, ces solutions ne vous procurerons jamais une réponse complète. La guérison finale vient avec la foi en Jésus Christ et en Ses enseignements, avec un cœur brisé et un esprit contrit et l’obéissance à Ses commandements. »
Devenir un être nouveau, né à nouveau et réellement changé nécessite des miracles, et c’est pour moi ce qu’est la guérison de mon mari : un miracle.
JE NE VEUX PLUS REVENIR EN ARRIÈRE
Au cours d’une soirée particulière, alors que nous dégustions un chocolat chaud dans une nuit d’hiver glacée remplie d’étoiles, mon mari a dit calmement : « Je ne veux plus jamais revenir en arrière. Je ne veux pas revenir au point de ne pas être guéri. Jamais. » Il semble que mon mari est en train de découvrir le principe de guérison décrit par Forest Benedict :
« La guérison est le procédé par lequel la luxure est remplacée par l’amour. C’est une opportunité d’apprendre l’art de la connexion et de l’engagement dans la vie. Cela veut dire se détacher des mécanismes de lutte néfastes pour se connecter avec le réel. Apprendre à se connecter sera sans doute l’aventure la plus difficile mais la plus gratifiante de votre vie. La connexion satisfait vraiment ce que la luxure ne peut pas satisfaire. »
Article écrit par The Hope and Healing Alliance et publié dans The meridian, traduit par Samuel Babin